En septembre 1917, le jeune docteur Bomgard, tout récemment promu au titre de docteur en médecine, gagne le poste où il a été nommé, dans le bourg de Mourievo, qui se situe dans le district de Gratchevka, proche de Smolensk, sur une voiture à cheval. Il arriva fourbu et engourdi du fait de la longueur et de l’inconfort du voyage.
A peine installé, il commença à s’inquiéter de l’activité qu’il allait devoir déployer, jugeant ses connaissances insuffisantes. Et effectivement, dès le début, il ne fut pas gâté : sa première patiente fut une toute jeune fille dont une jambe avait été broyée et qu’il devait amputer.
Puis il y eut le cas d’une femme qui devait accoucher et dont le fœtus se présentait mal : il dut pratiquer une version, totalement improvisée, à partir de ses vagues souvenirs de cours.
D’autres situations tout aussi difficiles se présentèrent encore à lui, et il eut la chance et le talent de s’en tirer favorablement à chaque fois.
Boulgakov, lui-même médecin, décrit les opérations de son alter ego avec clarté, empathie et suffisamment d’humour pour ne pas trop effrayer ses lecteurs. Il faut préciser que le jeune médecin était complètement isolé et ne pouvait compter que sur le soutien de quelques infirmières et d’un « feldscher », une sorte d’assistant médecin.
Un jour, le Docteur Bomgard dut traverser une effroyable tempête pour aller au secours d’un patient qui ne pouvait être déplacé.
Fort heureusement pour lui, ses interventions, même les plus risquées, se terminèrent avec des résultats positifs, ce qui lui valut une grande renommée dans les environs.
Après avoir quitté l’hôpital de Mourievo pour un poste plus important, il dut encore s’occuper de son successeur qui, frappé de dépression, se mit à absorber de la morphine. Boulgakov décrit avec une étonnante vivacité la progression de l’addiction chez le collègue de Bomgard, le jeune docteur Poliakov.
Le grand mérite de cet ouvrage est la capacité développée par son auteur à rendre son récit exaltant en dépit de l’atmosphère lourde de la pauvreté, de la maladie, des risques constants des opérations chirurgicales et de la difficulté de la vie dans cette région au climat hostile. C’est le talent de l’écrivain qui hausse ces récits à une dimension presque fantastique.