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9 août 2010 1 09 /08 /août /2010 19:37

Nous avons connu une parenthèse de chaleur et de soleil en Lettonie, au cours de cet été gris et pluvieux que nous avons retrouvé dès notre retour à Paris. Ce court séjour nous a permis de découvrir un pays discret, situé à la marge de l'Union Européenne, dont la capitale, Riga, est attachante, avec sa vieille ville restaurée, aux ruelles étroites, aux églises massives en brique et aux monuments baroques, avec en son centre un petit quartier juif assez émouvant, quand on pense aux persécutions qui ont touché ces contrées à différentes époques. Riga comporte surtout, au-delà des grands boulevards qui ceignent la vieille ville en demi-cercle à partir de la rive de la Daugava et des parcs qui les longent, des quartiers construits à la fin du XIXème siècle d'étonnants immeubles Art nouveau, qui affichent une grande diversité de motifs et de décorations. La période soviétique se révèle par l'université construite dans le plus pur style stalinien, derrière un immense marché.

La Parisienne 001 

La coexistence entre Lettons et Russes, au quotidien, ne paraît pas conflictuelle, malgré la difficulté des Russes à acquérir la citoyenneté Lettone. Notre passage dans la cathédrale orthodoxe russe, située sur une place à la hauteur des parcs, nous a permis d'admirer les formidables chants, toujours troublants.

Nos excursions à Jurmala, au bord de la mer, et à Sigulda, à l'intérieur, ont complété notre aperçu du pays, grâce à des voyages dans de vieux trains omnibus, traversant les banlieues de Riga, la campagne et la forêt de pins et de bouleaux. La grande plage de la Baltique, bordée de somptueuses datchas, m'a rappelé la Pologne et, à Sigulda, notre traversée en téléphérique au-dessus de la vallée de la Gauja a suscité un moment d'émotion lorsque l'engin est tombé en panne en cours de trajet, nécessitant l'intervention d'un technicien au sol, que nous avons attendu un bon quart d'heure, accrochés à un câble, dans les airs. Notre promenade ultérieure dans la vallée, parmi les ruines d'un château médiéval et à la découverte des grottes creusées dans les falaises qui dominent le lit de la rivière, s'est prolongée au retour jusqu'au centre de la bourgade, pour nous éviter de  renouveler la mésaventure de l'aller.  

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29 juin 2010 2 29 /06 /juin /2010 19:23

Mes impressions sont contradictoires à Dublin : en 1970, la ville m'était apparue vieillotte, grise, sale, malodorante et, pour tout dire, pas très belle. En 92, de passage à l'aller et au retour, elle me sembla plus avenante avec Grafton Street devenue rue piétonne, les façades des grandes artères du centre ravalées, les jardins bien entretenus. Cette année, ce jugement, globalement, se confirme malgré un certain désapointement de constater l'atmosphère mercantile qui règne désormais, avec le coût de la vie très excessif. L'élévation du niveau de vie, la réhabilitation de la ville, la renaissance touristique sont certes des motifs évidents de hausse des prix, mais que l'on atteigne des sommets avec une chambre d'hôtel minuscule, sans aucun service, me paraît abusif et laisse sentir la contagion du Royaume Uni où le tourisme bon marché que j'avais connu semble avoir disparu.

Le premier jour, J. nous a fait visiter la Dublin City University où il étudie et réside : très moderne, encore en chantier, à l'écart de l'animation du centre-ville, l'ensemble nous a paru très confortable et propice à l'étude. J. juge que les cours y sont d'un bon niveau et complètent utilement ses années d'étude passées à Grenoble.

A l'inverse, notre hôtel est situé au centre du quartier à la mode de Temple Bar, qui bruit toute la soirée du brouhaha de la foule, des cris et des musiques de l'animation populaire, dans les rues et les pubs. Des groupes se pressent aux portes des salles de concert, et des bateleurs, dès l'après-midi, retiennent l'attention des passants.

Notre programme pour ce séjour fait alterner promenades dans la ville et, si possible, dans les environs, et visites de musées.

Dimanche, après avoir quitté J., enregistré à l'hôtel et mangé un morceau dans un bar, nous sommes partis à la découverte de l'ouest, en passant à côté des deux cathédrales Christ Church et Saint Patrick, en traversant un quartier resté populaire, où les pubs au pied des vieilles maisons abondent, ainsi que les commerces désuets. Nous avons longé les bâtiments de la brasserie Guinness, des deux côtés de la rue. La population y est mélangée : nous avons croisé des familles d'origine indo-pakistanaise, voire arabe. En 1970 on ne voyait guère d'immigrés : le pays était sans doute encore trop pauvre. On y côtoie encore l'atmosphère de saleté qui m'avait frappé lors de mon premier séjour dans les quartiers aujourd'hui rénovés.

Hier en revanche, nous nous sommes dirigés vers les docks à l'est où subsistent des rues de petites maisons traditionnelles à côté d'immeubles d'habitation récents et de friches industrielles en chantier. Sur les quais de la Liffey, l'aménagement vise à l'édification d'ensembles de bureaux modernes et d'immeubles résidentiels qui, progressivement, remplacent les vieux entrepôts. Le style architectural rappelle celui de Bercy ou la Villette à Paris.

Même la rive nord, plus populaire et moins bien construite, tend à devenir un centre d'attraction commerciale important avec tous ses magasins et centres commerciaux ouverts même un jour férié, comme hier Bank holiday. La gare Conolly où nous avions pris le train en 92 a été rénovée et O'Connell Street va encore subir des aménagements.           

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22 juin 2010 2 22 /06 /juin /2010 20:58

On éprouve toujours quelque peine à se trouver transporté dans une ville étrangère sans autre transition que le déplacement à l’aéroport et la durée du vol. Cette impression m’a encore saisi le matin, à la sortie de l’aérogare de Berlin Tegel, lorsque nous attendions l’autobus dans le froid qui contrastait avec l’atmosphère parisienne des derniers jours. Après le bus le métro et, en sortant de la station Stadtmitte, nouveau choc : l’étrange sentiment de se retrouver dans un quartier délabré de Varsovie ou de Budapest. En fait nous logeons en plein Berlin Est, c’est-à-dire au milieu d’un vaste chantier qui atteint la porte de notre hôtel.

Toujours sous le coup du froid, nous sommes partis à la découverte de ce quartier de Mitte, depuis le Gendarmenmarkt, où nous logeons, en nous dirigeant avec des détours vers Unter den Linden, la Spree et l’Alexanderplatz.

Après déjeuner – dans un restaurant moderne de la Karl Liebknechtstrasse –, nous sommes allés découvrir l’Hôtel de Ville puis le Nikolaiviertel avant de retourner doucement vers notre hôtel, en entrant dans les églises. A Berlin Est les chaussées sont souvent défoncées, les échafaudages abondent et les immeubles modernes des années 60 ou 70 alternent avec des îlots d’immeubles restaurés à l’ancienne. Les monuments reconstruits ont souvent belle allure extérieurement, comme l’ensemble de Gendarmenmarkt, mais d’autres, à l’image des musées de l’Île aux Musées, paraissent vétustes. Plusieurs églises ont été affectées à des activités muséographiques, dénaturant ainsi leur aspect intérieur.

L’ensemble moderne de l’Alexanderplatz ne témoigne pas d’une grande qualité architecturale avec ses hauts immeubles déjà dégradés entourant l’immense tour de la télévision.

La réalisation la plus harmonieuse se situe dans le Nikolaiviertel avec ses petites maisons bien reconstituées, ses commerces et tous ses restaurants aux salles avenantes. Pour le reste, il faudra revenir dans une quinzaine d’années voir les progrès accomplis.    

Le lendemain, à peine sortis nous sentîmes le froid nous piquer le visage et les mains. Nous gagnâmes aussitôt la Brandenburger Tor et, de là, le Tiergarten ne nous parut pas attirant sous ce climat. Nous longeâmes le Reichstag – non restauré – et nous dirigeâmes vers l’Île aux Musées en marchant au bord de la Spree aux eaux si noires. L’après-midi fut consacré aux visites du Berliner Dom, vaste église néobaroque, de la Nationalgalerie aux collections un peu ternes de peintres allemands du XIXème, laissant quelques salles consacrées à des peintres français, et pour finir du Pergamonmuseum, aperçu en vitesse.

La visite de l’Ouest, le Kurfürstendam et le quartier environnant, marque un contraste avec l’Est, certes, mais assez caricatural : à Mitte des musées, des bâtiments officiels, de grandes églises, des théâtres et au Kurfürstendam des grands magasins, des centres commerciaux, des banques, de grands cafés… Les immeubles y sont généralement mieux entretenus mais le style est identique : de lourdes constructions du début du siècle, très Mitteleuropa, alternent avec des bâtiments des années 60-70, plus riches, plus cossus mais dans le même ton qu’à l’Est, les alignements en moins. L’apparence est résidentielle sans excès. On y trouve de petits restaurants et cafés d’allure populaire, offrant de la bière, des schnitzels et du goulasch et, autour de Savignyplatz, des boîtes de nuit et des cafés branchés… Le béton des bureaux domine sur l’Ernst-Reuterplatz. Notre découverte du quartier était toujours entrecoupée de stations plus ou moins longues dans le centre commercial Europa Center, dans la Gedächtniskirche qui fusionne vestiges de l’ancienne église et construction nouvelle, dans les magasins KaDeWe, Hertie, les librairies… , pour voir, acheter parfois, mais surtout pour nous réchauffer. Une grande animation règne dans la plupart des rues où l’élégance est tempérée par les nécessités climatiques. Il serait bien hasardeux d’affirmer qu’on ressent l’existence d’une vie à deux vitesses entre les deux pôles de la ville : les gens qui se pressaient dans les musées dimanche n’étaient-ils pas les mêmes qu’on rencontre sur le Kurfürstendamm lundi, à l’heure du déjeuner ou à la sortie du travail ? Sur le chemin du retour nous avons longé le zoo jusqu’à la station Tiergarten du S-Bahn.

Aujourd’hui, découverte de Kreuzberg, quartier des Turcs, des punks, des intellectuels anticonformistes… Ce n’est pas le grouillement d’Istanbul mais les magasins, les restaurants près de Kotthusser Tor sont bien turcs. Quelques ruelles joliment restaurées, des églises en brique rouge, un marché, une population mélangée, des enfants déguisés pour le carnaval dégagent une atmosphère bon-enfant en somme, sans l’odeur et le bouillonnement de bazar oriental de la Goutte d’Or, par exemple. Les lieux ne s’y prêtent pas d’ailleurs : rues trop droites et trop larges, se coupant à angle droit, places trop vastes : on est loin du tiers monde. Le métro aérien ajoute sa touche de pittoresque à ce quartier un peu différent, bien qu’aucun marché aux voleurs, ou autres, ne s’abrite sous son viaduc.

L’après-midi, changement de lieu et de style pour la visite du château de Charlottenburg sous la conduite d’une guide allemande en pantalon, bottes à hauts talons, un béret blanc sur le derrière de la tête et des lunettes de soleil en équilibre sur le front, avec un foulard à motifs en peau de léopard sur les épaules. Ses longues explications furent perdues pour la majorité des visiteurs qui n’en comprenaient pas un mot. De belles salles aux motifs baroques et rococo sont minutieusement restituées. L’ensemble est agréable à voir sans être inoubliable. Le plus intéressant pour moi était l’enfilade des pièces, d’un bout à l’autre du château, visible grâce aux portes ouvertes. En sortant nous avons effectué un bref tour dans le jardin longé par la Spree, avant de nous engouffrer dans le métro à la station Richard-Wagner-Platz.  

Ce matin, retour à la guerre froide, nous sommes allés jeter un coup d’œil à Checkpoint Charlie, le principal point de passage entre Berlin Est et Berlin Ouest. C’était l’occasion de nous projeter dans le passé, dans un roman d’espionnage. Pourtant, il est difficile d’imaginer décor plus banal que ce carrefour. Aujourd’hui que le mur a été détruit, un petit musée fait chèrement payer le souvenir de la coupure entre les deux Berlin, et des camelots turcs vendent de fausses casquettes d’officiers soviétiques. Mon seul regret : n’être pas venu avant 1989. Quelle vision pourra-t-on conserver du « rideau de fer » dans les générations à venir ? Ceux qui avaient l’habitude de le franchir n’y voyaient guère qu’une routine, comme nous à Cheb, ou même ici, à Berlin, sans sortir du train d’où je n’avais même pas distingué précisément l’emplacement du mur dans les années 70.        

Le reste de la journée se passa en promenade à Prenzlauer Berg, au nord de Mitte. Il s’agit d’un quartier populaire, apte à éveiller quelques souvenirs anciens : de la présence juive à Berlin, avec deux synagogues et un cimetière juif ; de la guerre – presque toutes les façades de la Krausnickstrasse restent criblées d’éclats de balles, et certaines églises, comme Sainte Elisabeth, sont en ruine. Des bâtiments originaux comme le château d’eau situé au bout de Strassburgerstrasse sur une petite colline, de belles maisons 1900, ici et là, restaurées ou non, des places avec de petits jardins, comme Zionkirchplatz, avec l’église construite au centre, ou Arkonaplatz, en cours d’aménagement, où nous avons déjeuné, Kollwitzplatz, Senefeldplatz, à côté du cimetière juif, confèrent son charme à tout ce quartier d’apparence tranquille, à deux pas du centre de Mitte et de l’Alexanderplatz. Nous avons terminé la visite par un tour en tramway, écourté dans Mollstrasse par la collision sans gravité du tramway avec une voiture mal positionnée à un carrefour.

D’autres images, maintenant perdues, m’ont impressionné. Dans l’ensemble Berlin me paraît une ville plutôt calme, où l’on vaque tranquillement à ses occupations sans trop de hâte. Tous les chantiers s’activent, sans démonstrations excessives d’agitation, de bruit ou de poussière, comme à Paris. Les signes de richesse ne s’étalent pas ; la pauvreté non plus – peu de mendiants ou de clochards. Les différences – des punks ou de leurs descendants, par exemple -, s’affichent sans agressivité. Bien sûr ces remarques vont à l’encontre de ce qui se dit ou s’écrit tous les jours sur la tension entre les deux Allemagnes, la difficulté de reconstruire le pays, la crise économique, etc… Cependant, la ville me paraît moins violente que Paris, moins contrastée aussi.

Je ne sais si mon intuition sera vérifiée, mais il me semble que tout ce travail à accomplir, cette actuelle difficulté de vivre, telle qu’elle est décrite par les journalistes – sans doute bien réelle, mais plus compréhensible par le raisonnement que perceptible par la simple observation – devraient se résoudre petit à petit, par une lente activité, opiniâtre, peu spectaculaire, mais efficace.

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En villégiature à Potsdam toute la journée après un voyage tranquille par le S-Bahn depuis Friedrichstrasse, nous découvrons la ville, défigurée comme Berlin par des immeubles modernes du plus mauvais goût parmi les monuments anciens, alors que dans le centre subsistent quelques belles rues aux maisons baroques, comme Brandenburgstrasse. La Brandenburger Tor, que nous pouvions détailler en déjeunant de poisson, était couverte d’échafaudages. Le but de notre excursion était Sans Souci, le château que Frédéric II se fit construire pour échapper à Berlin. La visite de ce château rococo fut expédiée en une demi-heure par un jeune guide énergique, ce qui nous laissa tout le temps d’arpenter le vaste parc sous un froid soleil de février et de nous approcher des autres bâtiments : orangerie, Neues Palais, Chinesisches Teehaus…

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La vie nocturne à Berlin ne paraît pas très intense : peu de monde le soir dans les rues ou le métro, fréquentation modérée des restaurants. Même sur le Kurfürstendam, vers 22 heures, peu de noceurs déambulaient et le restaurant du Kranzler Café n’abritait que quelques rares convives au hasard des tables. Dans les auberges du Nikolaiviertel le soir, la clientèle à forte dominance masculine ne remplit pas non plus les salles.

Ce matin la neige tombait sans interruption sur Berlin, sans nous empêcher de poursuivre nos promenades, d’abord orientées vers l’Askanischerplatz, où Kafka lorsqu’il venait à Berlin avait l’habitude de descendre à l’hôtel Askanischer Hof. Aujourd’hui il s’agit d’une vaste place dont tous les bâtiments anciens ont été détruits et qui n’a pas retrouvé de physionomie bien définie. De là nous gagnâmes Oranienburgerstrasse en S-Bahn.  

Tout le restant de la matinée nous parcourûmes les rues du quartier du Scheunenviertel et de la Spandauer Vorstadt, à la recherche du vieux Berlin de misère, du monde juif, des mauvais garçons, de la prostitution… Aujourd’hui encore c’est un quartier populaire de l’ancien Berlin Est, comme en témoignait la clientèle de l’auberge où nous avons pris un café. C’était l’univers de Franz Biberkopf, le héros de Berlin Alexanderplatz, d’Alfred Döblin. Le contraste y est criant entre les rues dont subsistent les immeubles anciens, non démolis et non restaurés, aux façades souvent endommagées par des éclats d’obus ou de balles, les ensembles complètement ravalés et les immeubles neufs. C’est peut-être le quartier de Berlin où nous nous sommes le mieux sentis, à la fois pittoresque, vivant, imprévisible et chaleureux. La neige, de surcroît, y adoucissait les sons et les formes et embellissait les rues.

L’après-midi nous avons abondamment circulé dans les transports en plein air : S-Bahn, tramway, bus, pour nous retrouver à l’Alexanderplatz, presqu’à notre point de départ, et revenir à l’hôtel à pied, en passant par Unter den Linden qui bientôt, sans doute, redeviendra la plus belle artère de Berlin.

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12 juin 2010 6 12 /06 /juin /2010 10:00

Le soir j'accompagne Z. dans son entraînement à la course. Comme chaque année, je me force à le suivre ; les premières fois, c'est toujours le même scénario : au bout d'un kilomètre environ, j'ai la poitrine prête à éclater, la gorge nouée, les jambes raides et je me contrains à continuer sans penser à rien. Je me trouve alors dans un état second où mon cerveau ne fonctionne pas selon les normes de la vie consciente, mais enregistre mécaniquement les obstacles du terrain à éviter ou à franchir et ignore complètement les servitudes d'un organisme inapte à l'effort demandé. Cet état procure un certain bien-être passager de tout le corps, qui se trouve pris inconsciemment dans la nature, dont il ressent pêle-mêle les excitations : odeurs, froid, vent, humidité, piqûres des orties, coups de fouet sur le visage ou les bras des branches d'épicéa... Ma torpeur s'achève lorsque Z. manifeste son désir de poursuivre sur une colline ou d'accélérer le train et qu'il me faut revenir seul en m'orientant pour retrouver le village. Alors je prends conscience de ma transpiration, de ma fatigue, et à la fin j'arrive à la maison en marchant, après une course de quatre ou cinq kilomètres seulement.

A partir de la quatrième ou cinquième course normalement, je me sens bien, je retrouve le rythme, mes muscles sont assouplis, mon souffle est régulier et tout mon corps jouit légèrement de se retrouver une élasticité un peu sauvage, primitive.

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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 20:10

En septembre 1969, il y eut une surprise collective lorsque la classe découvrit le professeur de philosophie : plus petit que la plupart d'entre nous, le visage cireux, un oeil artificiel, Christian de Rabaudy ne paraissait pas devoir nous en imposer. Lorsque nous fûmes tous assis en classe, dans une salle trop exiguë du Lycée Chaptal à Paris, il prit la parole et commença à nous expliquer en quoi consistait le programme de philosophie de notre terminale scientifique. Sa voix forte, au timbre métallique, me subjugua immédiatement. Il n'eut pourtant pas la vie facile avec ce groupe de garçons intéressés seulement à potasser les maths et la physique, dans ce qui devait être l'un des tout premiers postes de sa carrière. Malgré son charisme évident, la clarté de son langage et l'intelligence de sa réflexion, il n'échappa pas au chahut de ces élèves qui se souciaient comme d'une guigne de l'épistémologie, qui pourtant étudie les disciplines qu'ils pratiquaient à longueur de journée, sans trop réfléchir à leur origine et leur portée. Dans ces cas-là, il affrontait vaillamment la situation en apostrophant les fauteurs de trouble, les plaçant face à leurs contradictions avec une facilité déconcertante, qui finissait par en imposer aux plus irréductibles et à apaiser le vacarme.

Deux ou trois ans plus tard, je l'ai croisé à la maison de la culture de Reims, où nous assistions au Fracasse monté par Marcel Maréchal : il riait aux éclats et applaudissait avec vivacité. Le souvenir de ses réparties déconcertantes en classe, teintées d'humour, me revint à ce moment-là et j'en fus un peu intimidé devant lui.

A l'automne 2007, j'ai été ému de voir la Vie est une goutte suspendue, le beau film documentaire de Hormuz Kéy consacré à Christian de Rabaudy. Tourné dans les mois qui ont précédé sa disparition, le film le montre dans sa vie quotidienne à Paris, dans son appartement du Xème arrondissement, ou dans sa maison de campagne, drôle, original, subtil, vêtu de vêtements usagés, toujours trop grands, qu'il récupérait dans la rue, par un snobisme qui lui interdisait sans doute d'aller s'en acheter des neufs, recevant ses amis, dont les plus assidus étaient deux jeunes filles, une ancienne élève et une voisine, mannequin, qui constituaient l'essentiel de ce qu'il appelait sa famille d'adoption. Il souffrait du diabète, qui l'avait obligé à interrompre sa carrière, et tentait sans doute de lutter contre la douleur par ces rencontres régulières au cours desquelles il s'étourdissait par un flot de paroles, toujours à la recherche de concepts et d'explications de tous les événements de la vie, même dans ses composantes les plus triviales.

Il était déjà mort quand le film est sorti, nous montrant ses derniers mois avec beaucoup de chaleur. 

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30 mai 2010 7 30 /05 /mai /2010 18:34

409A Lascaux, les conditions de visite sont difficiles. Un bus régulier nous conduisit au site, où une place nous était réservée à une séance de visite de la reproduction de la grotte. De nombreux petits enfants vinrent agrémenter le commentaire de leurs cris. Cela ne retira rien à la splendeur des peintures : comme les musées, les grottes ne nous attirent que par la présence des oeuvres -  même factices - ou de leurs beautés naturelles.

Deux jours plus tard, la découverte du site du Regourdou, à côté de Lascaux, avec sa sépulture d'un homme de Néanderthal et ses ours, était plus tranquille. Puis une exposition des techniques de peinture des artistes de Lascaux nous fournit quelques clefs pour mieux comprendre les peintures, l'après-midi. Il s'agissait de décrire le mode de composition de certaines scènes majeures à partir d'hypothèses plausibles. L'ensemble était intéressant, même si nous sommes demeurés incapables d'en tirer des conclusions définitives.  

Lascaux reste un cas d'école : les peintures originales sont définitivement détériorées et inaccessibles, mais leurs copies attirent des foules de plus en plus compactes. C'est une situation digne d'un film de Fellini.

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25 mai 2010 2 25 /05 /mai /2010 19:51

404La visite de Sarlat nous rappela à bon escient la nécessaire lutte contre la servitude volontaire, qui doit se poursuivre en tout temps, malgré l'évolution des régimes politiques et des moeurs. En ces lieux, en attendant, c'est aussi à l'esprit mercantile qu'il serait bon de s'opposer, à la vue des centaines de visiteurs qui se bousculent dans les échoppes des ruelles du centre de la ville.

Les rues de Sarlat, la nuit, sont bien mises en valeur par un éclairage adapté. Les venelles obscures, qui montent vers les remparts depuis l'artère transversale, dessinent bien la forme de l'urbanisme médiéval dans cette cité établie au fond d'une cuvette. Seule cette artère, la rue de la République, donne un aspect plus moderne à cette ville autrement préservée dans son coeur historique. La conséquence naturelle de cette beauté est l'afflux touristique, qui repose autant sur les attraits gastronomiques que sur le charme de la vieille ville.

Dans tout ce décor, la maison natale de la Boétie constitue une attraction non négligeable, par sa magnificence, plus que par l'influence actuelle de son ancien habitant, malheureusement trop peu lu par nos contemporains. 

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17 mai 2010 1 17 /05 /mai /2010 17:41

La montée de Pont-sur-Yonne à Miremy, depuis le haut du Ravillon, longe la dernière tranche du lotissement qui a été entamée. Ces maisons neuves se donnent des airs de manoirs avec des tours rondes ou carrées prises entre deux corps de bâtiment. Après avoir passé ces incongruités, on découvre vers la vallée la vue du clocher de l'église qui se détache sur la rivière, au milieu des branches dénudées. Puis le chemin traverse un bosquet, avant d'arriver sur l'arrondi de la colline où apparaissent les premières cabanes délabrées qui précèdent le hameau de Miremy. Servent-elles de logis à un sous-prolétariat local, ou d'abris à des vacanciers périodiques ? Leur état de demi-abandon ne saurait nous renseigner.

 

 

Autre texte sur Pont-sur-Yonne dans le blog de Asepa environnement :

 

Patrimoine et paysage : des textes inspirés...

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